Le présent post à pour objet de prendre position sur la question relative à la procédure, aux capacités nécessaires et aux règles de majorité applicables au bornage de limite faisant intervenir un fonds soumis au statut de la copropriété. La question qui se pose est notamment de savoir quelles sont les conditions requises pour qu’un syndic puisse signer un procès-verbal de bornage. Pour cela, il faut déterminer à quelle majorité de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété et des immeubles bâtis doit être approuvé un procès-verbal de bornage.
La qualité pour agir en bornage en copropriété
C’est le syndicat des copropriétaires qui a qualité pour agir en justice en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble, et donc pour agir en bornage. L'action en bornage relative aux parties communes d’une copropriété n'est pas recevable contre les copropriétaires mais seulement contre le syndicat1. Il en est de même s’agissant d’une action en reconnaissance de mitoyenneté.
Il convient donc de convoquer dans tous les cas le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic, aussi bien dans le cadre d’une action en bornage amiable ou judiciaire, que d’une action en reconnaissance de limite. Le syndic, en sa qualité de mandataire du syndicat des copropriétaires, doit assister à la réunion contradictoire de bornage. Il appartient au géomètre-expert de mettre en œuvre son obligation de moyens pour identifier le syndic régulièrement désigné.
Cas de la copropriété dépourvue de syndic
En présence de copropriété dépourvue de syndic ou en présence de copropriété qui s’ignore, il convient de conseiller aux copropriétaires de convoquer une assemblée générale ayant pour objet la désignation d’un syndic (article 17 de la loi du 10 juillet 1965).
A défaut d’un syndic régulièrement désigné dans un délai raisonnable, le géomètre-expert sera dans l’obligation de rédiger un procès-verbal de carence, le syndic étant le seul à pouvoir signer un procès-verbal de bornage pour le compte du syndicat des copropriétaires.
Les règles de majorité en copropriété
Vote à la majorité de l’article 24 : Il s’agit des décisions de l’assemblée générale prises à la majorité des voix des copropriétaires présents, représentés ou ayant votés par correspondance.
Vote à la majorité de l’article 25 : Il s’agit des décisions de l’assemblée générale prises à la majorité des voix de tous les copropriétaires.
Vote à la majorité de l’article 26 : Il s’agit des décisions de l’assemblée générale prises à la majorité des copropriétaires représentant au moins les deux-tiers des voix.
Les Passerelles de vote
Afin de favoriser la prise de décision en assemblée générale, il existe deux passerelles de vote, une première passerelle permettant de passer de la majorité absolue vers la majorité simple et une seconde passerelle permettant de passer de la majorité des 2/3 à la majorité absolue.
Passerelle vers la majorité simple : Dans la mesure où la résolution votée à l’assemblée générale a recueilli au moins le tiers des voix, l’assemblée générale peut procéder immédiatement à un second vote à la majorité de l’article 24.
Passerelle vers la majorité absolue : Si la résolution votée à l’assemblée générale a recueilli l’approbation d’au moins la moitié des copropriétaires présents, représentés ou ayant votés par correspondance et que cette approbation représente au moins le tiers des voix alors l’assemblée générale peut procéder immédiatement à un second vote en se prononçant à la majorité des voix de tous les copropriétaires.
Le bornage, acte de disposition ou acte d’administration ?
La position de l’Ordre des géomètres-experts est que la procédure à mettre en œuvre doit être dans tous les cas celle d’un acte de disposition, afin de mieux garantir la force de l’acte et de le rendre non contestable.
Pourtant, les analyses de nombreux avocats sont globalement convergentes et confirment qu’en ce qui concerne la copropriété, l’approbation du procès-verbal de bornage relèverait d’un acte d’administration devant faire l’objet d’une approbation par l’assemblée générale à la majorité de l’article 24.
Néanmoins, la Cour de cassation a considéré que « une action en bornage entre dans la catégorie des actes d’administration et de disposition ». Civ. 3ème 9 juillet 2003 n° 01-15613
Au regard de ce qui précède, il y a lieu de considérer que l’opération de bornage et/ou de reconnaissance de limite peut être, soit un acte d’administration soit un acte de disposition en fonction du cas d’espèce.
La procédure à appliquer
Lorsque la copropriété est demanderesse, il doit préalablement y avoir un vote en assemblée générale pour missionner un géomètre-expert afin qu’il engage l’opération de bornage.
Le syndic, représentant de la copropriété, doit être convoqué par écrit à la réunion de bornage. Le règlement de copropriété, l’état descriptif de division et les plans annexés doivent être analysés.
Il appartient au géomètre-expert de justifier dans le procès-verbal que lorsque les opérations consistent à entériner des limites de propriété séparées par des éléments fixes en place (cas d’un acte d’administration), il y a lieu d’appliquer une approbation par l’assemblée générale à la majorité de l’article 24.
Il appartient au géomètre-expert de justifier dans le procès-verbal de bornage que lorsque les opérations consistent à proposer une limite de propriété non matérialisée par des éléments fixes en place (cas d’un acte de disposition), il y a lieu d’appliquer une approbation par l’assemblée générale à la majorité de l’article 25.
Le procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites doit être validé en assemblée générale.
Le syndic soumet au vote de l’assemblée générale la validation du procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites à la majorité de l’article 24, s’il s’agit d’un acte d’administration ou de l’article 25 s’il s’agit d’un acte de disposition.
En cas de vote de cette résolution à la majorité de l’article 25, les dispositions de l’article 25-1 s’appliquent si le vote a recueilli au moins le tiers des voix. Le procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites est alors immédiatement remis au vote à la majorité de l’article 24.
En cas de validation du procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites et après avoir purgé le délai de recours de deux mois suivant la date de notification du procès-verbal d’assemblée générale à tous les copropriétaires (sauf validation à l’unanimité lors de l’assemblée générale), le syndic, dûment mandaté par cette même assemblée générale, signe le procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites.
Afin d’assurer une transparence et pour un suivi rigoureux de la procédure, il est judicieux que le syndic de copropriété transmette au géomètre-expert une copie du procès-verbal d’assemblée générale.
En cas de refus du procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites par l’assemblée générale, le syndic en informe le géomètre-expert en lui communiquant la copie du procès-verbal d’assemblée générale, en respectant le délai de recours.
Le géomètre-expert rédige alors un procès-verbal de carence.
Cas des petites copropriétés :
Les petites copropriétés sont définies à l’article 41-8 de la loi du 10 juillet 1965. Ce statut s’applique si une des deux conditions suivantes est réalisée :
- Copropriété composée au plus de 5 lots principaux à usage de logements, bureaux ou commerces ;
- Budget annuel prévisionnel moyen de la copropriété sur une période de trois exercices consécutifs inférieur à 15000€.
Les petites copropriétés ont la possibilité de prendre des décisions à l’unanimité par consultation écrite sans qu’il y ait lieu de convoquer une assemblée générale pour toutes les décisions ne relevant pas du vote du budget prévisionnel et de l’approbation des comptes.
Ainsi, le procès-verbal de bornage peut être validé par consultation écrite organisée par le syndic, à son initiative ou à l’initiative d’un copropriétaire. La validation du procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites est entérinée si et seulement si la décision est prise à l’unanimité. Cette décision des copropriétaires est ensuite consignée par le syndic dans un procès-verbal de consultation spécifique.
A défaut de décision unanime, le procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites doit être soumis au vote de l’assemblée générale. Alors, le cas général visé ci-dessus s’applique.
Cas des copropriétés à deux :
Les copropriétés à deux sont des copropriétés où le nombre de voix est réparti entre deux copropriétaires indépendamment du nombre de lots.
Les règles de prises de décisions en assemblée générale sont définies à l’article 41-16 de la loi du 10 juillet 1965.
En assemblée générale :
- Le copropriétaire détenant plus de la moitié des voix peut prendre seul les décisions relevant de la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant votés par correspondance et désigner le syndic ;
- Le copropriétaire détenant au moins deux tiers des voix peut prendre seul les décisions relevant de la majorité des voix de tous les copropriétaires ;
- Chaque copropriétaire, indépendamment de son nombre de voix, peut prendre seul les décisions relevant de la conservation de l’immeuble quand bien même celles-ci ne présenteraient pas de caractère d’urgence.
Les copropriétés à deux ont la possibilité de prendre des mesures conservatoires et les décisions mentionnées à l’article 41-16 de la loi du 10 juillet 1965, à l’exception de l’approbation des comptes et du vote du budget prévisionnel, sans réunion d’assemblée générale. Le copropriétaire décisionnaire est alors chargé de l’exécution des décisions et doit les notifier à l’autre copropriétaire.
Un procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites peut donc être validé par le copropriétaire majoritaire. Si le procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites est assimilé à un acte d’administration, le copropriétaire validant le procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites doit détenir plus de la moitié des voix. Si le procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites est assimilé à un acte de disposition, le copropriétaire validant le procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites doit détenir au moins deux tiers des voix.
Le procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites signé doit être accompagné de la copie de la notification de la décision envoyé à l’autre copropriétaire.
Les copropriétaires peuvent également se réunir sans convocation préalable et prendre des décisions à l’unanimité. Le procès-verbal de bornage et de reconnaissance de limites peut également être validé dans ces conditions (article 41-18 de la loi du 10 juillet 1965).
Le bornage d'une copropriété